Rachel le créateur
Science-fiction ou réalité, le fait de vivre sous un dôme ? Une planète verte où il fait bon vivre ? Des Créateurs ? Existent-ils vraiment ?
Suivez les aventures de Rachel et de sa famille.
Chose certaine, vous ne voudrez plus vous en détacher !
La méchante Sarah
La vie continua sur la petite planète Verte. Les hommes peinèrent en travaillant d’arrache-pied afin de rencontrer les quotas. Jacob avait organisé les horaires pour que son peuple puisse jouir le plus possible de leurs loisirs et fit tout ce qu’il put afin que leur planète ne soit pas taxée. Il leur expliqua que les taxes sont perçues par ceux qui ne donnent rien en échange et qu’elles sont une forme d’esclavage. Il valait mieux travailler dur que d’être soumis.
Rachel n’avait plus une minute à elle. Ses nouveau-nés étaient moins résistants du fait qu’elle n’avait plus autant de temps à leur consacrer. Ils mouraient souvent en groupe. L’affinité manquait, elle n’avait plus le temps de doser son affection et de les encourager à vivre.
Sous la tension, les disputes éclatèrent. Sarah, qui ne foutait rien, monopolisait l’attention de son père et tentait de l’éloigner de sa mère. Des bruits couraient que Gabriel voyait la fille d’un ouvrier en cachette. Sarah avait distillé un peu de poison ici et là.
En entrant dans la maternité, elle trouva sa mère effondrée.
− Pourquoi pleures-tu, maman ? lui demanda gentiment Sarah.
− Pourquoi est-ce que Gabriel me fait ça à moi ? Je travaille tant que je suis lasse le soir venu. Il devrait comprendre et m’aimer davantage au lieu de…
Devenue soudainement froide comme glace, Sarah lui dit :
− Et toi, tu devais le comprendre aussi. Il ne fait pas partie de la classe des ouvriers. C’est un Créateur complètement obnubilé par toi. Tu l’étouffes avec tes exigences. Il ne peut plus rien créer de pur.
− Sarah ! Comment oses-tu ?
− Regarde-toi, est-ce que tu t’es vu dans une glace ? Tu es lourde et vieille, tu n’as plus d’attraits pour lui. Regarde tes mains toutes gonflées et tes ongles couleur terre.
Rachel regarda alternativement ses mains et sa fille. Tristement elle lui demanda :
− Pourquoi me détestes-tu autant, Sarah.
Dans un élan de sincérité, elle répliqua :
− Je ne le sais pas mais je sais que je te déteste plus que tout au monde !
− Je t’en prie, ne touche pas à Gabriel, il est toute ma vie !
− Il n’est pas fait pour toi, tu ne le mérites pas. Regarde-toi et tu comprendras.
Sarah quitta sa mère bourrée de haine envers elle. Au fond, tout au fond d’elle-même, elle savait qu’elle venait de passer les bornes.
Pendant ce temps, Gabriel inquiet s’entretenait avec son beau-père et Ismaël.
− Rachel n’en peut plus, il lui devient impossible de créer dans ces conditions. Elle a tant de pression sur les épaules que je dois faire quelque chose pour l’aider. Je ne pourrai supporter plus longtemps de voir ma douce Rachel dans cet état.
− Mon très cher beau-frère, je suis désolé que Rachel et tout le petit peuple se soit retrouvé dans cette situation intenable. Jacob a pourtant tout fait pour tenter d’alléger leur tâche mais cela n’a pas suffi. J’ai promis à père de garder le silence mais je n’en avais pas le droit. Voilà…
− Ismaël ! Je t’en prie, ne lui dis pas ! lui demanda le vieil homme avec conviction.
− Allons tous les deux, s’il y a quelque chose que je doive savoir, vous devez me le dire voyons ! Que sont tous ces mystères ?
Ismaël jeta un regard vers son père qui se détourna tristement.
− Voilà, Gabriel, assieds-toi. Nous avons cru qu’ils se lasseraient et laisseraient tomber la demande et la menace, c’est pourquoi nous ne t’avons rien dit.
− Mais de quoi parles-tu ? demanda Gabriel de plus en plus inquiet, quelle menace ?
− Cette situation intenable ne peut plus durer. Le Grand Commissaire et ses sept trous du cul lèveront la taxe et la surcharge de travail si tu acceptais d’aller vivre sur la planète mère pendant une borne. Ils veulent que tu les aides à résoudre leur problème de pollution.
Ébahi, Gabriel secoua la tête, complètement renversé par la nouvelle.
− Et vous avez laissé Rachel et le peuple se soumettre à un travail accru et s’épuiser à cause de cela sans jamais rien me dire ?
− Non, nous n’avons rien dit, nous ne voulions pas vous séparer. Je sais que sans toi, Rachel subira encore une plus grande perte. Tu es le soleil de sa vie. Elle est notre Créateur !
− Mais il ne me réclame que pour une borne ! C’est ridicule !
− Je n’y crois pas, ils ne respectent jamais la parole donnée, je les connais !
− Allons, Jacob, je ferai le contrat d’une borne et je reviendrai. Je suis prêt à porter leurs vêtements pour que Rachel retrouve sa joie de créer.
− S’il ne s’agissait que d’un vêtement, Gabriel, tu n’es pas de leur race, tu ne connais pas leurs pièges. Rachel et toi êtes indénouables. Sans l’un, l’autre aura du mal à survivre.
− Jacob ! Vous ne changerez jamais, je pars pour une borne, pas pour la vie ! Cela permettra à tout le monde de respirer. Rachel pourra créer un autre chef-d’œuvre juste pour moi pendant mon absence. Ne craignez rien tous les deux, rien ne pourra détruire Rachel et Gabriel. Nos deux noms sont soudés pour l’infinité des temps !
− J’aimerais tant voir la vie sous ton angle, Gabriel, quelque chose de mauvais est entré dernièrement et je ne suis jamais arrivé à le découvrir pleinement.
Jacob soupira lourdement, les yeux mouillés il ajouta :
− Je dois me faire vieux.
− Allons, Jacob, il y a tant d’amour et de sagesse dans votre cœur que jamais il ne vieillira !
− Tu es gentil, Gabriel ! Il se peut que je dramatise la situation et il est vrai que si tu partais pour une borne, l’espoir renaîtrait dans le cœur des ouvriers, c’est sûr, mais je ne suis pas convaincu que tu reviendras et alors, notre petit Créateur mourra loin de son amour.
Brisé, Gabriel rentra chez lui et raconta toute l’histoire à sa femme.
− Si mon père croit que c’est un piège, pourquoi ne le crois-tu pas ? C’est un mage, je ne l’ai jamais vu se tromper. Partir pendant une borne, ce n’est pas terrible mais si tu ne revenais pas j’en mourrais.
− Oh ! Rachel chérie, je ne sais plus que croire. Si tu continues comme ça, je vais perdre mon petit Créateur de toute façon.
− Non, ta présence m’aide énormément. Tu es mon soutien, lorsque tu es là, je suis heureuse et seul le bonheur aide à ma créativité.
Réfléchissant à ce qu’elle venait de lui révéler, Gabriel prit une décision.
− Très bien, continuons de la sorte encore quelques lunes, il y a toujours la possibilité qu’ils se découragent ne voyant aucun mouvement de notre part.
− Gabriel, sais-tu que Sarah raconte que tu couches avec la fille d’un ouvrier ? Je veux connaître l’entière vérité sur ses dires.
− Je vais parler sérieusement avec cette petite idiote, je ne comprends pas pourquoi elle raconte de pareilles sottises !
− Tu n’es jamais là, les jours de repos, je me retrouve seule la plupart du temps.
Sans plus d’explication sur ses absences, Gabriel prit une décision concernant sa fille.
− À quatorze bornes, elle est en mesure de travailler. Je vais l’envoyer s’occuper un peu, son indolence la pousse à inventer des histoires à dormir debout.
− Sa méchanceté, elle est très méchante, Gab, crois-moi, j’en sais quelque chose.
− Je vais y voir dès aujourd’hui.
Envoyée de force au travail dans la quatrième forêt, Sarah, au paroxysme de la colère changea totalement de tactique. Elle se mit à travailler tout en injectant un peu plus de venin parmi les ouvriers. Elle devint amicale, aidante et parfois efficace. Toute la journée elle transportait les arbres de la forêt aux vaisseaux marchands dans un immense sailk.
Un jour, pendant la pause alors que les hommes cassaient la croûte, elle leur dit :
− Savez-vous à qui nous devons ce travail de forçat ?
− Oui, bien sûr, c’est la confédération qui nous oblige…
− Non, Gravin, ce n’est pas la confédération, c’est Rachel qui vous tient là avec le sourire.
− Pourquoi dis-tu cela, Sarah, demanda Gravin qui venait de s’approcher.
− Parce que c’est la pure vérité. Rachel vous fait peiner comme des esclaves parce qu’elle refuse de laisser partir son mâle adoré.
Ils cessèrent tous de manger et regardèrent la petite d’un air courroucé. Encouragée par ce silence, elle leur raconta l’histoire à sa manière en omettant les vérités.
− Pour une seule petite borne, Rachel refuse ! s’exclama le plus influençable du groupe.
− Non ! Rachel nous aime trop pour nous tenir ainsi dans la misère, répliqua une jeune femme.
− Désolé de vous décevoir tous mais Rachel n’aime que son Gabriel. Il n’y a de place pour personne d’autre dans son cœur de Créateur. Et je suis bien placée pour le savoir ajouta-t-elle tristement.
Plus personne n’avait faim après cette révélation.
Une autre femme du nom de Samanta posa sa main sur la nuque de Sarah et dit :
− C’est vrai ce que la gamine dit, je l’ai souvent vue toute seule à la maison alors que Rachel et Gabriel marchaient au loin main dans la main. Ils semblaient seuls au monde !
Et les murmures gagnèrent de plus en plus d’oreilles attentives. Sarah distillait son poison modérément et celui-ci gagnait les autres forêts.
Deux clans se formèrent désormais, ceux qui étaient pour et ceux qui étaient contre. Rachel garda tout de même la faveur de la majorité.
Un jour, alors que tout un secteur de nouveau-nés venaient de mourir, Clank, un ouvrier de la première forêt qui se trouvait à proximité, voyant Rachel au bord de l’épuisement lui dit :
− Excuse-moi si je te parle crûment, Rachel, mais ces échecs viennent du fait que tu ne laisses pas partir ton mari. Tu es exténuée et nous aussi et tout cela n’est dû qu’à ton entêtement.
Rachel le regarda longuement ne sachant si elle devait se fâcher de son insolence ou simplement lui expliquer. Elle opta pour la seconde.
− Clank, j’ignore ce que tu sais de la situation mais ce n’est pas le fait que Gabriel parte pour une borne qui est le problème, c’est qu’il ne revienne jamais. Comprends-tu ! Mon père croit qu’il y a piège sous roche.
− Sarah nous a dit que Gabriel ne devait partir qu’une borne et que tu dramatisais le reste. Si tu ne crois plus ton mari lorsqu’il promet de revenir c’est que tu n’as plus confiance en lui et ça c’est bien triste.
− Sarah ! Encore elle ! se dit Rachel amère. Merci d’avoir eu le courage de venir me parler. Sache que la raison que ma fille vous a donnée n’est pas la bonne ! Maintenant, retourne à ton travail, Clank.
− Bien, Créateur.
Plus du tout certain d’avoir fait la bonne chose, Clank s’en retourna tout penaud.
À la nuit tombée, Rachel se réveilla en sueur.
− Gab, Gab, j’ai quelque chose à te dire.
– Oui, poussin, répondit-il tout endormi.
− Gab, je consens que tu ailles chez les civilisés, il n’est plus question d’endurer ce martyr plus longtemps.
− Quoi ? Tu veux…
− Les ouvriers n’en peuvent vraiment plus, je n’en peux plus, je ne cesse de perdre des bébés, rien ne peut être pire que cette situation. Pars avec Sarah, c’est moi qui te le demande.
Parfaitement réveillé, il assied son long corps nu en l’appuyant au mur frais.
− D’accord, j’irai mais ce ne sera pas avec joie. Mon amour, je ne te quitterai jamais, tu seras toujours dans ma pensée. Je t’aime tant !
Ils firent l’amour encore et encore mais aucun rire ne vint teinter leurs ébats.
Le départ de Gabriel
Le Grand Commissaire envoya une petite délégation chercher Gabriel. Une femme magnifique descendit du vaisseau. Son secrétaire la suivit avec une mallette. Le chauffeur privé du gouverneur vint les chercher pour les amener en son manoir.
Cette femme inspirait à la fois l’intelligence, le raffinement et la beauté. Elle remit au gouverneur les documents officiels qui relaxaient le travail intensif. Elle lui promit de venir signer le contrat d’annulation qui stipulait que la dite planète Verte serait à l’avenir exempte d’impôts et de surcharge de travail, dès que Gabriel se sera engagé.
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