Fondation de Montréal (1641) par M. de Maisonneuve
L'établissement de l'île de Montréal fut commencé quatre ans après (1641). Les premiers missionnaires avaient voulu engager la compagnie du Canada à occuper cette île, dont la situation était avantageuse et pour contenir les Iroquois et pour l'oeuvre des missions. Mais elle n'avait point goûté leur plan.
Enfin, ce projet avait été repris par M. de la Dauversière, receveur-général de la Flèche en Anjou, et il s'était formé, sous ses auspices, une association de 35 personnes puissantes et pieuses, pour faire en grand à Montréal ce qui avait été fait en petit à Sillery.
Elle obtint en 1640 la concession de cette île, et l'année suivante Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve, gentilhomme de Champagne, et l'un des associés, arriva à Québec avec plusieurs familles. Il fut déclaré gouverneur de Montréal le 15 octobre 1642.
Il y éleva une bourgade palissadée, à l'abri des attaques des Indiens. Il la nomma Ville-Marie, pour les Français. Les Sauvages chrétiens, ou voulant le devenir, devaient occuper le reste de l'île, où l'on travaillerait à les civiliser graduellement et à leur enseigner l'art de cultiver la terre.
Ainsi Montréal devint à la fois une école de civilisation, de morale et d'industrie, destination noble qui fut inaugurée avec toute la pompe et la splendeur de l'église. Peu de temps après, il y arriva un renfort sous la conduite de M. d'Aillebout de Musseau, qui fut suivi d'un second l'année suivante.
La même entreprise se continuait alors à Québec. Une petite colline boisée séparait le collège des Jésuites de l'Hôtel-Dieu. L'on avait bâti des maisons à l'européenne de chaque côté sous les murs de ces monastères, pour loger les Sauvages et les accoutumer à vivre à la manière des Français.
Les Montagnais et les Algonquins aidèrent à ceux-ci à défricher une partie du plateau sur lequel est assise la ville haute. Mais cette tentative n'eut pas plus de succès que les autres de ce genre qu'on faisait ailleurs.
M. de Maisonneuve voulant visiter la montagne de Montréal, fut conduit sur la cime par deux vieux Indiens qui lui dirent, « qu'ils étaient de la nation qui avait autrefois habité ce pays. Nous étions, ajoutèrent-ils, en très grand nombre, et toutes les collines que tu vois au midi et à l'orient, étaient peuplées.
Les Hurons en ont chassé nos ancêtres, dont une partie s'est réfugiée chez les Abénaquis, d'autres se sont retirés dans les cantons iroquois, quelques-uns sont demeurés avec nos vainqueurs. »
Ce gouverneur touché du malheur qui avait frappé cette nation, leur dit de tâcher d'en rassembler les débris. Qu’il les recevrait avec plaisir dans le pays de leurs pères, où ils seraient protégés et ne manqueraient de rien. Mais tous leurs efforts ne purent réunir les restes d'un peuple dont le nom même était oublié.
Ce peuple était-il le même que celui que Cartier avait visité à Hochelaga plus de cent ans auparavant ? Les annales des Sauvages remontent peu loin sans se perdre.
Les premiers voyageurs ne pouvaient faire un pas dans les forêts de l'Amérique sans entendre parler de tribus qui avaient existé dans des temps peu reculés, selon nos idées, mais déjà bien loin dans celles de ces peuples, dont chaque siècle révolu couvre l'histoire d'un profond oubli. Il est au moins certain que la description de cette bourgade par Cartier correspond à celle des villages iroquois.
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