KANEL

 

Louise Alarie

Mais qui est donc ce magnifique chiot ?

Quelle sorte de dons a-t-il ?


Suivez les aventures d’une petite fille très malade, qui vit toutes sortes d’aventures qui auront beaucoup d’influence sur son entourage.

KANEL AMUSE, PROTÈGE



Elvira n’eut aucune rechute de l’année. Partout où ses parents l’emmenaient, Kanel suivait. Il n’y avait aucune interdiction la concernant. Elle apprenait vite, un jour alors qu’Elvira lui montrait des trucs à faire, elle réussit à la faire marcher sur deux pattes et à l’aide de la musique, à la faire danser. La petite chienne exécutait tous les tours qu’Elvira lui montrait, sans apparente difficulté.


Elvira ne guérissait pas, mais son mal n’augmentait pas. À l’heure du repas un midi, sa mère mit son assiette devant elle. La gamine ne prit que quelques bouchées en abandonnant le reste.


– Pourquoi ne manges-tu pas ce que je te donne, Elvira ? Est-ce que tu n’aimes pas ce que je fais ?


– Mais non maman, c’est délicieux !


– C’est à peine si tu y touches et cela dure. Tu ne t’alimentes pas suffisamment.


– Maman, je ne peux pas manger plus. Même si je me forçais, je crois que je vomirais.


– Tu manges moins que ton chien qui est tout petit, ce n’est pas normal ce manque d’appétit. Je vais consulter une nutritionniste et nous verrons ce que nous pourrons faire.


– Comme tu voudras, dit Elvira, se sentant devenir triste.


Kanel s’approcha immédiatement d’elle et lui tendit quelques croquettes qu’elle avala. Ce qui fit rire Elvira mais pas sa mère.


Lucie regarda ce petit jeu qui n’en finissait pas et sentit la colère monter en elle. Heureusement, elle réussit à la contenir, se souvenant de la réaction de sa fille.


– Je vais m’informer afin de trouver une bonne nutritionniste le plus rapidement possible.


– Comme tu voudras, maman, répéta Elvira en quittant la table.


Une fois dans sa chambre, elle se sentit malheureuse et dit à Kanel :


– Je déteste que l’on parle de nourriture, c’est la pire chose à entendre. Je ne peux pas manger plus, si seulement ma mère cessait de me donner autant de nourriture. Ah ! je déteste manger !


Kanel, qui avait grandi du double, pouvait maintenant monter seule sur le lit. Elle s’approcha de sa petite maîtresse et se colla contre elle pour la réconforter.


– Toi, tu me comprends. Je me contenterais de manger tes croquettes tous les jours, c’est vite avalé et on peut faire autre chose. Qu’en penses-tu, toi la sage de la famille ? Voilà que je devrai voir une nutritionniste qui ne fera que parler de nourriture ! La barbe ! Que ma mère y aille sans moi !


Kanel se mit à gémir en frottant sa truffe contre le visage de la gamine.


– Il ne te manque que la parole, toi ! Tu comprends absolument tout ce que je dis, quelle merveilleuse petite Kanel tu es ! Je t’aime très fort, tu sais ! Allons un peu dehors, il ne fait pas trop froid. Je m’assoirai dans la grande berceuse et je te lirai un conte.


C’est ce qu’elle fit. Pendant que la petite lisait, Kanel, bien assise sur son petit derrière écoutait l’histoire. La mère qui observait tout en travaillant, n’en revenait pas de voir ce petit chien en train d’écouter une histoire sans même bouger une oreille.


– Quel phénomène, que cette Kanel ! Elle se comporte comme une nounou.


Vite fatiguée, Elvira termina son histoire et voulut se lever mais elle en fut incapable. Voyant cela, Kanel se mit à aboyer et à tourner sur elle-même. Lucie sortit immédiatement en courant presque. Elle connaissait ce genre d’aboiement.


Elle prit Elvira et la rentra pour la coucher.


– Merci, maman, dit-elle en fermant déjà les yeux.


Lucie entreprit de chercher une nutritionniste et fit quelques appels afin de trouver la meilleure. On lui recommanda une certaine Séléna Guinbourg, qui, de l’avis d’une amie, était la meilleure avec les enfants. Elle lui téléphona donc. À l’accent, elle comprit qu’il s’agissait d’une femme noire. Après avoir pris rendez-vous, elle se dit : « C’est peut-être mieux pour Elvira qu’elle soit noire, cela la mettra d’avantage en confiance ».


Le jour du rendez-vous venu, Elvira ne se sentait pas très bien.


– Vas-y sans moi, maman, je ne vais pas super bien aujourd’hui.


– Elle ne pourra rien faire sans toi, voyons ! C’est si long avant d’avoir un rendez-vous avec elle, je t’en prie, force-toi un peu, ma biche !


– Vas-y, parle-lui de moi et raconte-lui ce que tu veux, ensuite prends un autre rendez-vous avec elle. Maman, je t’en prie, juste d’entendre parler de nourriture ça me rend malade !


Lucie, voyant à quel point sa fille semblait perturbée par la nourriture, prit la décision de rencontrer la nutritionniste toute seule.


– Très bien, dit-elle, tu as gagné pour cette fois. Je vais y aller seule.


– Merci, maman ! dit Elvira avec un peu de joie dans son sourire.




Lucie entra dans le bureau de la nutritionniste qui, surprise de ne pas voir sa fille lui dit :


– J’ignore ce que je peux faire sans elle.


– J’ai décidé de venir quand même. Ma fille n’est pas bien du tout. Elle fait une leucémie qui ne s’aggrave pas mais qui ne guérit pas. Ce matin, elle ne se sentait pas assez bien pour venir.


– Quel est le problème de votre fille à part sa leucémie ?


– Elle ne mange pas, à peine quelques bouchées et tout s’arrête.


– Depuis quand est-elle comme ça ?


– Depuis toute petite, elle a maintenant six ans et depuis l’âge de deux ans, je ne l’ai jamais vu manger correctement.


– Qu’est-ce qu’elle dit à ce propos ?


– Que trop de nourriture lui donne mal au ventre. Elle disait cela avant même sa maladie. La nourriture la révulse, cela fait peine à voir. Savez-vous quoi ? Elle a une petite chienne depuis un an et cette bête lui donne quelques croquettes tous les jours et ma fille les mange, cela me fâche à chaque fois. Je ne peux rien y faire, c’est un jeu entre sa chienne et elle. J’ai tenté de m’y opposer mais les deux coquines gagnent toujours.


– Elle n’aurait pas par hasard manqué de nourriture durant sa tendre enfance ?


– Je n’en sais rien. Nous l’avons adoptée alors qu’elle avait deux ans.


– Je vois, dit la spécialiste. Si cette enfant a été privée de nourriture en bas âge, il est possible que ce soit à cela qu’elle réagisse.


...