Pêcheur d’Islande
 

Un homme amoureux de la mer peut-il être amoureux de quelqu’un d’autre ?


Découvrez la vie des marins dans ce coin lointain qu’est l’Islande ainsi que sur les mers du monde.


L’auteur reussit à nous faire prendre la mer jusqu’en Chine, et nous faire sentir et ressentir toues sortes d’émotions.


Un livre rempli de sensibilité, malgré la virilité d’un marin.


Un monde à découvrir !


Cela en fait indéniablement un chef d’oeuvre !

Sommaire



PREMIÈRE PARTIE

Introduction

La grande pêche dangereuse

Écrire une lettre

Gaud (Marguerite)

La rencontre avec Yann

La deuxième rencontre

En juin, à bord de la Marie

Un vapeur, là-bas !


DEUXIÈME PARTIE

Menace écrite en l’air

De retour

Marcher vers Pors-Even

Me marier ? Pour quoi faire ?

Sylvestre

Les adieux avant la Chine

Sur des mers inconnues

C’était l’Inde

La veille du départ des pêcheurs

Naufrage ?

Sylvestre, à l’autre bout de la terre


TROISIÈME PARTIE

La bataille

Le retour vers la France

Cet enterrement

Vendre à la criée

On demande la vieille Yvonne

Yvonne, soûle ?

Yann apprend la nouvelle

À son poste de pêcheur

Août qui clôt la saison d’Islande

Qui est-ce qui a parlé ?

Gaud à la chaumière des Moan

Les Islandais sont de retour

Des journées bien grises

Au cabaret de Mme Tressoleur

On tue son chat

Enfin chez elle !


QUATRIÈME PARTIE

Se faire la cour

Les préparatifs

Fleuri pour eux

Des questions

Le mariage

Le dîner de noces

Ce moment de départ


CINQUIÈME PARTIE

Leur dernier repas

Le départ

Les lettres

Ces mois d’été

L’attente du retour

Toujours pas revenu !

Fin de septembre

Septembre fini

Tendue

Conclusion

Des livres captivants



À propos de la couverture : Port Hofn, en Islande, de Bogdan / Dreamstime



Me marier ? Pour quoi faire ?



— ME MARIER ? disait Yann à ses parents le soir — me marier ? Eh ! donc, mon Dieu, pour quoi faire ?


Est-ce que je serai jamais si heureux qu'ici avec vous ? Pas de soucis, pas de contestations avec personne et la bonne soupe toute chaude chaque soir, quand je rentre de la mer... Oh ! je comprends bien, allez, qu'il s'agit de celle qui est venue à la maison aujourd'hui.


D'abord, une fille si riche, en vouloir à de pauvres gens comme nous, ça n'est pas assez clair à mon gré. Et puis ni celle-là ni une autre, non, c'est tout réfléchi, je ne me marie pas, ça n'est pas mon idée.


Ils se regardèrent en silence, les deux vieux Gaos, désappointés profondément. Car, après en avoir causé ensemble, ils croyaient être bien sûrs que cette jeune fille ne refuserait pas leur beau Yann.


Mais ils ne tentèrent point d'insister, sachant combien ce serait inutile. Sa mère surtout baissa la tête et ne dit plus mot. Elle respectait les volontés de ce fils, de cet aîné qui avait presque rang de chef de famille.


Bien qu'il fût toujours très doux et très tendre avec elle, soumis plus qu'un enfant pour les petites choses de la vie, il était depuis longtemps son maître absolu pour les grandes, échappant à toute pression avec une indépendance tranquillement farouche.


Il ne veillait jamais tard, ayant l'habitude, comme les autres pêcheurs, de se lever avant le jour. Et après souper, dès huit heures, ayant jeté un dernier coup d'oeil de satisfaction à ses casiers de Loguivy, à ses filets neufs, il commença de se déshabiller, l'esprit en apparence fort calme. Puis il monta se coucher, dans le lit à rideaux de perse rose qu’il partageait avec Laumec, son petit frère.



Sylvestre



DEPUIS quinze jours. Sylvestre, le petit confident de Gaud, était au quartier de Brest. Très dépaysé, mais très sage. Portant crânement son col bleu ouvert et son bonnet à pompon rouge. Superbe en matelot, avec son allure roulante et sa haute taille. Dans le fond, regrettant toujours sa bonne vieille grand-mère, et resté l'enfant innocent d'autrefois.


Un seul soir il s'était grisé, avec des pays, parce que c'est l’usage. Ils étaient rentrés au quartier, toute une bande se donnant le bras, en chantant à tue-tête.


Un dimanche aussi, il était allé au théâtre dans les galeries hautes. On jouait un de ces grands drames où les matelots, s'exaspérant contre le traître, l'accueillent avec un hou ! qu'ils poussent tous ensemble et qui fait un bruit profond comme le vent d'ouest.


Il avait surtout trouvé qu'il y faisait très chaud, qu'on y manquait d'air et de place. Une tentative pour enlever son paletot lui avait valu une réprimande de l'officier de service. Et il s’était endormi sur la fin.


En rentrant à la caserne, passé minuit, il avait rencontré des dames d'un âge assez mûr, coiffées en cheveux, qui faisaient les cent pas sur leur trottoir.


— Écoute ici, joli garçon, disaient-elles avec de grosses voix rauques.


Il avait bien compris tout de suite ce qu’elles voulaient, n'étant point si naïf qu'on aurait pu le croire. Mais le souvenir, évoqué tout à coup, de sa vieille grand-mère et de Marie Gaos l'avait fait passer devant elles très dédaigneux, les toisant du haut de sa beauté et de sa jeunesse avec un sourire de moquerie enfantine. Elles avaient même été fort étonnées, les belles, de la réserve de ce matelot :


— As-tu vu celui-là ! Prends garde, sauve-toi, mon fils. Sauve-toi vite, l'on va te manger.


Et le bruit de choses fort vilaines qu'elles lui criaient s'était perdu dans la rumeur vague qui emplissait les rues, par cette nuit de dimanche.


Il se conduisait à Brest comme en Islande, comme au large, il restait vierge. — Mais les autres ne se moquaient pas de lui, parce qu'il était très fort, ce qui inspire le respect aux marins.

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