Brésil
 

Aimez-vous le Brésil ? Connaissez-vous les différents peuples qui s’y cotoient ?


Suivez ces explorateurs, parfois sans scrupule, qui en veulent toujours plus.

Sommaire


Prologue

Possessions portugaises

Les Français ont des vues sur le Brésil

Éviter de couler

La famine à bord

Quoi manger ?

Arrivés en Bretagne

Recommencer à manger lentement

L'enflure maintenant

Les Hollandais s'en mêlent

Description du Brésil

Rio de Janeiro

La capitainerie de Rio-Grande

La capitainerie de Satin-Paul

Une république de bandits à l'origine

Les Mamelucs

La ruse des Mamelucs

Les gouvernement de Minas-Geraes

Espiritu-Santo, Porto-Seguro et Ilheos

La ville de Bahia

Fernambouc

Le gouvernement de Maragnan

Le gouvernement de Para

Le gouvernement de Mato-Grosso

Peuples sauvages du Brésil

Les Tapuyas

Les Tomomymis, nation très féroce

Croyance ?

Les sales Ouetacas

Les Brésiliens

La nourriture des Brésiliens

Le festin suite à un massacre

Les anciens

Témoin d'une escarmouche

Le rituel de la mise à mort

Un autre massacre

Les Brésiliens ne manquent pas de raison et de bonté

Les us et costumes

L'accueil du voyageur

La langue des Topinamboux

La nature au Brésil

Les singes

Les autres animaux

Les lézards et serpents

Les oiseaux

La pêche

Les arbres

Le brésillet

D'autres arbres

Fleurs et végétaux

Climat, montagnes, rivières, mines, commerce

Les diamants

L'or

Mot de la fin

Des livres captivants




Note à propos de la couverture : Le Chef Raoni, figure emblématique du combat contre la déforestation, au milieu d’autres chefs indiens brésiliens.

De Agência Brasil, une agence de presse publique brésilienne, par Dantadd, 2007.



Les Français ont des vues sur le Brésil



Les Français, qui ont commencé partout des établissements dont la plupart ont été depuis négligés ou perdus, portèrent aussi leurs vues vers le Brésil dès l'an 1555.


Villegagnon, chevalier de Malte et vice-amiral, obtint de Henri II la permission d'aller fonder une colonie dans le Nouveau-Monde. Secrètement attaché aux opinions nouvelles du protestantisme, il mena avec lui une foule de sectaires sous la protection du fameux amiral de Coligny, dont il donna le nom au premier fort qu'il bâtit dans une petite île sur la côte du Brésil, où depuis on a bâti Rio de Janeiro.


Mais Villegagnon, que les protestants ont ensuite traité d'apostat, revint au catholicisme. Les colons, irrités de ce qu'ils appelaient sa défection, refusèrent de poursuivre les travaux et se mutinèrent. Villegagnon se débarrassa d'eux en les embarquant sur le vaisseau le Jacques, qui partit le 4 janvier 1558. Tout ce qu'il y avait de monde à bord montait à 45 hommes, matelots et passagers, sans y comprendre le capitaine et Martin Baudouin du Havre, maitre du vaisseau.


Éviter de couler



Après avoir navigué sept ou huit jours, il arriva pendant la nuit que les matelots qui travaillaient à la pompe ne purent épuiser l’eau. Le contremaitre, surpris d'un accident dont personne ne s’était défié, descendit au fond du vaisseau et le trouva non seulement entrouvert en plusieurs endroits mais si plein d'eau qu'on le sentait presque enfoncer.


Tout le monde ayant été réveillé, la consternation fut extrême. Il y avait tant d'apparence qu'on allait couler à fond que la plupart désespérant de leur salut, se préparèrent à la mort. Néanmoins, quelques-uns prirent la résolution d'employer tous leurs efforts pour prolonger leur vie de quelques moments.


Un travail infatigable fit soutenir le navire avec deux pompes. Jusqu'à midi, c’est-à-dire près de douze heures, pendant lesquelles l'eau continua d'entrer si furieusement que l'on ne put diminuer sa hauteur. Et passant par le bois de Brésil dont le vaisseau était chargé, elle sortait par les canaux aussi rouge que du sang de boeuf.


Les matelots et le charpentier, qui étaient sous le tillac à chercher les trous et les fentes, ne laissèrent pas de boucher enfin les plus dangereux avec du lard, du plomb, des draps et tout ce qu'on leur présentait. Le vent qui portait vers terre l'ayant fait voir le même jour on prit la résolution d'y retourner.


C'était aussi l'opinion du charpentier, qui s'était aperçu dans ses recherches que le navire était tout rongé de vers. Mais le maître craignant d'être abandonné de ses matelots s'ils touchaient une fois au rivage, aima mieux hasarder sa vie que ses marchandises, et déclara qu'il était résolu de continuer sa route.


Cependant, il offrit aux passagers une barque pour retourner au Brésil. À quoi Dupont, que les protestants reconnaissaient pour chef, répondit qu'il voulait tirer aussi vers la France et qu'il conseillait à tous ses gens de le suivre.


Là-dessus, le contremaître fit observer qu'outre les dangers de la navigation, il prévoyait qu'on serait longtemps sur mer et que le navire n'était point assez fourni de vivres. Il n'y eut que six personnes à qui la double crainte du naufrage et de la famine fit prendre le parti de regagner la terre, dont on n'était qu'à neuf ou dix lieues, tant Villegagnon avait inspiré de terreur.


Elle ne pouvait pas être mieux fondée, car trois de ceux qui revinrent au Brésil furent pendus en arrivant. Au reste, le sort des autres pendant la traversée fut si affreux qu'on ne sait si l'on doit les féliciter d'être échappés à une mort pour en souffrir mille. Laissons parler ici Léry, auteur de cette épouvantable relation, sans rien ôter à la naïveté de son style :


« Le vaisseau normand remit donc à la voile comme un vrai cercueil, dans lequel ceux qui se trouvaient renfermés s'attendaient moins à vivre jusqu'en France qu'à se voir bientôt ensevelis au fond des flots. Outre la difficulté qu'il eut d'abord à passer les basses, il essuya de continuelles tempêtes pendant tout le mois de janvier. Et nécessitant point de faire beaucoup d'eau, il serait péri cent fois le jour si tout le monde n'eût travaillé sans relâche aux deux pompes.


On s'éloigna ainsi du Brésil d'environ deux cents lieues jusqu'à la vue d'une île habitable, aussi ronde qu'une tour, qui n'a pas plus d’une demi-lieue de circuit. En la laissant de fort près à gauche, nous la vîmes remplie non seulement d'arbres, couverte d'une belle verdure mais d'un prodigieux nombre d'oiseaux, dont plusieurs sortirent de leur retraite pour venir se percher sur les mâts de notre navire, où ils se laissaient prendre à la main.


Il y en avait de noirs, de gris, de blanchâtres et d'autres couleurs, tous inconnus en Europe, qui paraissaient fort gros en volant, mais qui était pris et plumés n'étaient guère plus charnus qu'un moineau.


À deux lieues sur la droite, nous aperçûmes des rochers fort pointus, mais peu élevés, qui nous firent craindre d'en trouver d'autres à fleur d'eau, dernier malheur qui nous aurait sans doute exemptés pour jamais du travail des pompes. Nous en sortîmes heureusement.


Dans tout notre passage, qui fut d'environ cinq mois, nous ne vîmes pas d'autres terres que ces petites îles, que notre pilote ne trouva même pas sur sa carte et qui peut-être n'avaient jamais été découvertes.


On se trouva le 3 février à 3° de la ligne. C’est-à-dire que depuis près de sept semaines, on n'avait pas fait la troisième partie de la route. Comme les vivres diminuaient beaucoup, on proposa de relâcher au cap de Saint-Roch, où quelques vieux matelots assuraient qu'on pouvait se procurer des rafraîchissements. Mais la plupart se déclarèrent pour le parti de manger les perroquets et d'autres oiseaux qu'on apportait en grand nombre et cet avis prévalut.


Nos malheurs commencèrent par une querelle entre le contremaître et le pilote, qui pour se chagriner mutuellement, affectaient de négliger leurs fonctions. Le 26 mars tandis que le pilote faisant son quart, c’est-à-dire conduisant trois heures, tenait toutes les voiles hautes et déployées, un impétueux tourbillon frappa si rudement le vaisseau qu'il le renversa sur le côté jusqu'à faire plonger les hunes et le haut des mâts.


Les câbles, les cages d'oiseaux et tous les coffres qui n'étaient pas bien amarrés furent renversés dans les flots, et peu s'en fallut que le dessus du bâtiment ne prît la place du dessous. Cependant, la diligence qui fut apportée à couper les cordages servit à le redresser par degrés.


Le danger quoiqu’extrême, eut si peu d'effet pour la réconciliation des deux ennemis, qu'au moment qu'il fut passé et malgré les efforts qu'on fit pour les apaiser, ils se jetèrent l'un sur l'autre et se battirent avec une mortelle fureur.


Ce n'était que le commencement de nos infortunes. Peu de jours après, dans une mer calme, le charpentier et d'autres artisans, cherchant le moyen de soulager ceux qui travaillaient aux pompes, remuèrent si malheureusement quelques pièces de bois au fond du vaisseau, qu'il s'en leva une assez grande par où l'eau entra tout d'un coup, avec tant d'impétuosité que ces misérables ouvriers, forcés de remonter sur le tillac, manquèrent d'haleine pour expliquer le danger et se mirent à crier d’une voix lamentable :


Nous sommes perdus ! Nous sommes perdus !


Sur quoi le capitaine, maître et pilote, ne doutant point de la grandeur du péril, ne pensaient qu'à mettre la barque dehors en toute diligence, faisant jeter en mer les panneaux qui couvraient le navire, avec grande quantité de bois de Brésil et autres marchandises.


Et délibérant de quitter le vaisseau, ils voulaient se sauver les premiers. Même le pilote, craignant que pour le grand nombre de personnes qui demandaient place dans la barque, elle ne fût trop chargée. Il y entra avec un grand coutelas au poing et dit qu'il couperait les bras au premier qui ferait semblant d'y entrer.


Tellement, que nous voyant délaissés à la merci de la mer et nous ressouvenant du premier naufrage dont Dieu nous avait délivrés, autant résolus à la mort qu'à la vie, nous allâmes nous employer de toutes nos forces à tirer l'eau par les pompes pour empêcher le navire d’aller à fond. Nous fîmes tant qu’elle ne nous surmonta point.


Mais le plus heureux effet de notre résolution fut de nous faire entendre la voix du charpentier, qui étant un jeune homme de coeur n'avait pas abandonné le fond du navire comme les autres.


Au contraire, ayant mis son caban à la matelote sur la grande ouverture qui s'y était faite et se tenant à deux pieds dessus pour résister à l’eau, laquelle, comme il nous dit après, de sa violence le souleva plusieurs fois. Il criait en tel état de toute sa force qu'on lui portât des habillements, des lits de coton et autres choses pour empêcher l’eau d'entrer pendant qu'il racoutrerait la pièce. Ne demandez pas s'il fut servi aussitôt. Et par ce moyen, nous fumes préservés.


On continua de gouverner tantôt à l'est, tantôt à l'ouest, qui n'était pas notre chemin, car notre pilote, qui n'entendait pas bien son métier, ne sut plus observer sa route. Et nous allâmes ainsi, dans l'incertitude jusqu'au tropique du cancer, où nous fûmes pendant quinze jours dans une mer herbue.


Les herbes qui flottaient sur l'eau étaient si épaisses et si serrées qu'il fallut les couper avec des coignées pour ouvrir le passage au vaisseau. Là, un autre accident faillit nous perdre. Notre canonnier faisant sécher de la poudre dans un pot de fer, le laissa si longtemps sur le feu qu'il rougit, et la flamme ayant pris à la poudre donna si rapidement d'un bout à l'autre du navire qu'elle mit le feu aux voiles et aux cordages.


Il s'en fallut peu qu'elle ne s'attachât même au bois, qui étant goudronné n'aurait pas manqué de s'allumer promptement et de nous brûler vifs au milieu des eaux. Nous eûmes quatre hommes maltraités par le feu, dont l'un mourut peu de jours après, J'aurais eu le même sort si je ne m'étais couvert le visage de mon bonnet. J'en fus quitte pour avoir le bout des oreilles et les cheveux grillés.

Sur Amazon

Sur Amazon


Sur YouTube

Portugais et Hollandais, capitainerie, république de bandits, Mameluc et autre tribu, Tapuyas et Tomomymis nation très féroce, langue des Topinamboux, singes et serpents